Alfa Giulia : promesse tenue
VERDICT CHRONO
La Giulia est digne de son ancêtre : une familiale sportive proposant une alternative aux références de son segment, d’autant plus crédible qu’elle se montre à la fois plus plaisante à conduire et plus abordable que ses rivales allemande et anglaise dites « premium ». Des qualités qui s’avèrent largement suffisantes pour faire passer une finition parfois perfectible et une liste d’options moins étendue que celles de ses concurrentes.
LE PROJET
Après une 4C dédiée à l’image de marque, c’est à la Giulia de concrétiser le retour d’Alfa Romeo sur le plan commercial. Avec 6 mois de retard sur son calendrier initial dus à des problèmes d’industrialisation, la Giulia arrive enfin. La berline familiale tricorps italienne est assemblée dans l’usine de Cassino avec la Giulietta. Elle étrenne une toute nouvelle plateforme propulsion modulaire baptisée Giorgio qui devrait servir de base à deux SUV, une grande berline, un coupé et un cabriolet d’ici à 2020. Pour la France, les objectifs d’Alfa Romeo restent toutefois raisonnables avec 2 000 Giulia d’ici à la fin 2016, et 3 000 en année pleine sur 125 concessions.
LA TECHNIQUE
Annoncée comme la plus légère de son segment – à 1 374 kg à vide pour la version diesel, 1 580 pour la Quadrifoglio –, la Giulia voit pourtant sa structure très rigide (35 000 Nm/deg) majoritairement construite en acier, à l’exception des chapelles d’amortisseurs avant et de leurs barres anti-rapprochement en aluminium. Aluminium qui est aussi utilisé pour la fabrication des portes, des ailes avant et du capot de la Giulia « cœur de gamme », la version Quadrifoglio ayant droit à un capot et à un pavillon en plastique renforcé de fibres de carbone.
L’allègement concerne aussi la partie mécanique avec un arbre de transmission là encore en plastique renforcé de fibres de carbone et une gamme moteur 100 % en aluminium. Ainsi, le nouveau 4 cylindres 2,2 turbo diesel étrenné par la Giulia – et proposé en versions 150 et 180 ch – pèse 30 kg de moins que le moteur à bloc fonte qu’il remplace. Un nouveau 4 cylindres 2 litres turbo essence à distribution MultiAir (système hydraulique de levée variable en continu des soupapes d’admission) sera aussi proposé à la rentrée en versions 200 et 280 ch. Il sera assemblé dans l’usine de Termoli, aux côtés du Fire (4 cylindres 1.2 et 1.4) et du nouveau V6 biturbo animant la Giulia Quadrifoglio.
Au sens strict du terme, ce V6 n’est donc pas un moteur Ferrari – il ne sort pas des fonderies de Maranello –, mais il a bien été conçu par un ingénieur venant de Ferrari, raison pour laquelle il reprend le concept de chambre de combustion à injecteur sur le côté et l’entraxe de cylindres du V8 3,9 biturbo de la California T. Ce V6 présente plusieurs particularités intéressantes. Pour commencer, il présente un angle inscrit de 90° permettant de réduire sa hauteur et de dégager plus de place entre les bancs de cylindres. Comme le V6 Maserati de la SM ou le PRV (Peugeot Renault Volvo) de première génération, il utilise un vilebrequin à trois manetons (chacun portant deux bielles) à 120°. Un choix architectural qui présente l’avantage de la légèreté de la rigidité et de la compacité, mais l’inconvénient de déterminer une séquence d’allumage irrégulière alternant angles de 90° et de 150° entre deux combustions, au lieu du 120° attendu pour un 6 cylindres. Le concepteur du moteur assume cette particularité qui ajoute selon lui à la personnalité du moteur. Il est aussi particulièrement fier d’avoir conçu le premier V6 à disposer d’un banc de cylindres entièrement désactivable pour réduire la consommation à faible charge : outre l’allumage et l’injection, toutes les soupapes des 3 cylindres du côté droit peuvent être désactivées grâce à des poussoirs dont le caractère télescopique est commandé hydrauliquement par le déplacement de goupilles.
Les motorisations de lancement (2.2 diesel et V6 2.9 biturbo) sont proposées au choix avec des boîtes manuelles 6 rapports (Getrag limitant le couple du 2,2 à 380 Nm, ou ZF pour le V6) ou automatique 8 rapports (ZF). Une transmission à 4 roues motrices sera proposée ultérieurement, mais a priori pas pour la Quadrifoglio, destinée aux puristes de la propulsion, qui dispose en outre d’un différentiel ZF à vecteur de couple (comme celui des BMW X6 et Lexus RC-F) et d’amortisseurs pilotés Sachs.
À noter qu’une version « Eco » de la 2.2 diesel de 180 chevaux à boîte automatique 8 vitesses – dotée de pneumatiques à ultra basse résistance au roulement, d’une garde au sol réduite, d’un étagement de transmission et d’éléments aérodynamiques spécifiques – a été homologuée à seulement 99 g/km de CO2, ce qui devrait particulièrement intéresser la clientèle des entreprises.
LA VIE À BORD
La position de conduite est excellente avec une assise bien basse – plus encore que celle d’une BMW Série 3 ou d’une Mercedes Classe C – et une colonne de direction haute et très horizontale disposant d’un réglage en profondeur de généreuse amplitude. On aurait juste souhaité une assise de siège un peu plus longue, ou réglable. L’habitabilité arrière est dans la bonne moyenne pour la catégorie, tout comme le volume de coffre (480 l), même si celui-ci n’est pas très accessible en raison d’un seuil plutôt haut. Il peut néanmoins être modulé moyennant l’option banquette à dossier rabattable facturée 250 euros.
Si la finition n’est, certes, pas au niveau d’une Audi A4 – considérée comme la référence du segment – ni à celui d’une BMW série 3, elle apparaît en revanche comparable à celle d’une Jaguar XE. L’équipement de série intègre la combinaison d’une caméra et d’un radar pour proposer le freinage d’urgence autonome détectant les piétons et l’alerte de franchissement de ligne. Toutefois, la liste d’options, beaucoup plus courte que celle de ses concurrentes, fait pour l’instant l’impasse sur des équipements en voie de généralisation telles que l’affichage d’instruments tête haute ou les aides à la conduite flirtant avec la conduite autonome telle que l’assistant d’embouteillage.
L’AVIS DU POINT AUTO
Dès les premiers mètres, la Giulia distille une impression de légèreté et d’agilité étonnante pour une berline de ce gabarit. Un caractère largement dû à sa direction ultra-directe – 11,7° de braquage volant pour 1° à la roue contre 15 pour 1 en moyenne dans ce segment -, bien servie par un essieu avant à triangles superposés (à pivot virtuel pour l’inférieur) très incisif. La réussite des metteurs au point d’Alfa Romeo est d’avoir obtenu ce caractère très dynamique sans contrepartie en termes de stabilité – l’essieu train arrière multibras restant bien calé en virage au service de la précision de trajectoire – ou de confort de suspension, un domaine dans lequel cette Giulia aux ressorts plutôt souples et à l’amortissement passif très bien calibré se permet même de dominer des rivales plus sophistiquées dans ce domaine. Ce bilan dynamique apparaît d’autant plus remarquable qu’il est obtenu avec pneumatiques « Run Flat » chaussés sur des jantes de 18 pouces pour notre 2.2 turbo diesel, seules les enveloppes 16 pouces d’entrée de gamme faisant l’impasse sur ce type de carcasse renforcée pour permettre de rouler à plat jusqu’à 80 km/h.
Sur le plan du freinage, la Giulia innove par l’adoption d’un système Continental dit « Brake by Wire » centralisant assistance, ABS et ESP dans le même bloc hydraulique alimenté par une pompe électrique. Plus compact et plus léger de 3 à 4 kilogrammes ce système assure en outre une montée en pression beaucoup plus rapide du freinage autonome au profit de distances d’arrêt plus courtes en cas d’urgence. Parce qu’il traduit précisément et sans délai l’effort que le conducteur exerce sur la pédale de frein en force de freinage calculée de manière optimale pour chacune des roues, ce système s’avère facile à moduler tout en garantissant à la Giulia une stabilité à toute épreuve sur mauvais revêtement ou en courbe.
Le nouveau 4 cylindres 2.2 turbo diesel du groupe FCA n’a aucun mal à déplacer les 1374 kg de la Giulia, surtout pour la version 180 chevaux de notre modèle d’essai. Disponible dès 1200 tr/min il souffre de ce fait moins d’être associé à une simple boîte manuelle que ses concurrents BMW ou Jaguar même s’il ne peut donner le meilleur de lui même que lorsqu’il est secondé par la boîte automatique 8 rapports qui accepte son couple maximal de 450 Nm quand la boîte manuelle Getrag le limite à 380. Pertinente dans le choix de ses rapports, la boîte automatique ZF peut néanmoins toujours être contrôlé directement par le conducteur par l’intermédiaire de grandes palette en aluminium fixées sur la colonne de direction façon Ferrari.
À ce stade, nous n’avons pu conduire que quelques kilomètres et seulement sur circuit la très performante Quadrifoglio. Un parcours trop court pour se faire une opinion définitive sur ce modèle mais suffisant pour constater qu’Alfa Romeo a largement tenu sa promesse de proposer une concurrente digne de ce nom à la mythique BMW M3. Plus performante, la Giulia se montre pourtant plus facile à conduire et confortable que sa rivale germanique, mais pas moins amusante. Très stable au freinage comme les autres versions de la gamme, la Quadrifoglio profite en effet de son différentiel à vecteur de couple pour optimiser son agilité en adoptant en sortie de courbe serrée une attitude de survirage de puissance très facile à contrôler grâce à sa direction directe. Un régal.
LES PLUS
Compromis confort/comportement, direction ultra directe
Caractère, performances (Quadrifoglio)
Sobriété (version Eco)
LES MOINS
Maintien des sièges insuffisant (2.2)
Finition inférieure aux références du segment
Apparition du « fading » (surchauffe des freins) peu perceptible (Quadrifoglio)
Sous le capot des Giulia 2.2 180 & Quadrifoglio
Moteur : 4 cylindres en ligne injection directe turbodiesel / V6 à 90° biturbo à injection directe d’essence
Cylindrée : 2 143 / 2 891 cm3
Puissance : 180 ch à 4 000 tr/min / 510 ch à 6 500 tr/min
Couple : 450 Nm à 1 750 tr/min (380 à 1 500 en BVM) / 600 Nm à 2 500 tr/min
Transmission : aux roues arrière
Boîte : manuelle 6 rapports (automatique 8 rapports en option)
Dimensions : 4 640 x 1 870 x 1 430 mm
Coffre : de 480 l
0 à 100 km/h : 7,2 s (7,1) / 3,9 s
Vitesse : 220 km/h (230) / 307 km/h
Consommation : 4,2 l (4,2) / 8,2 l
CO2 : 109 g/km (109) Eco 99 g/km (pas de malus) / 198 g/km (malus de 6500 euros)
Poids : 1 374 kg (7,6 kg/ch) (1445 (8,0)) / 1580 kg (3,1 kg/ch)
Prix : à partir de 39 100 euros / 79 000 euros
Site internet : www.alfaromeo.fr/