Spetses, le Saint-Tropez grec
De son charme naturel les Athéniens parlent peu, préférant garder l’île pour eux, à l’abri des foules et de la surenchère immobilière. Pourtant, ils sont de plus en plus nombreux à venir trouver ici une tranquillité sans artifice, retapant des maisons de pêcheurs à l’arrière du vieux port ou louant les anciennes demeures de capitaine. À commencer par le roi Constantin de Grèce, qui, à l’été 2010, y maria son fils, Nikolaos. Le Poseidonion Grand Hotel, bâtisse « Belle Époque » ouverte sur la mer, accueillit alors les noces où se pressèrent les têtes couronnées d’Europe. Comme un flash-back d’un siècle rappelant que l’île avait déjà ses inconditionnels. À l’orée du XXe siècle, Sotirios Anargyros, enfant du pays, est de retour sur son île natale après avoir fait fortune dans le tabac aux États-Unis. Il achète la moitié de l’île, la replante de pinèdes, s’y fait construire une belle demeure et convie chaque automne la haute société grecque à chasser la palombe dans ses collines. Le magnat rêve d’en faire un lieu de villégiature à l’image de la Côte d’Azur.
Gentry bohème
Inspiré du Carlton et du Negresco, tous deux bâtis à la même époque, le Poseidonion Grand Hotel ouvre en 1914. S’ensuivent la construction d’une route en corniche autour de l’île et d’une école d’élite pour garçons, sur le modèle du collège britannique d’Eton. À la fin des années 50, dans le sillage de Niarchos, autre célèbre armateur qui s’offre Spetsepoula, l’îlot d’en face, une gentry bohème fait de Spetses son point d’ancrage. Dans les ruelles pavées près du port de Dapia s’apostrophent l’artiste et le pêcheur, le banquier et le conducteur de calèche (l’île est interdite aux voitures), Anouk Aimée, Melina Mercouri, Jacques Lacarrière, l’auteur de L’Été grec, ou encore Michel Déon, qui y signa les plus belles pages de son Balcon de Spetsai.
Cuisine bio méditerranéenne
Aujourd’hui, la famille Vordonis, qui a racheté l’hôtel en 2004 avant de le rénover avec grand soin, participe au renouveau économique en organisant des événements : la Tweed Run, course cycliste costumée très british, ou la Classic Yacht Race, pour admirer caïques et autres voiles latines.
Chaque été, la véranda qui longe l’entrée à colonnades est le lieu d’une douceur exquise ; 52 chambres la surplombent, tantôt bercées par le clapotis des vagues, tantôt embaumées par les lavandes entourant la piscine. Sous une coupole d’ardoise qui révèle une magnifique charpente, la suite royale se distingue par une vaste terrasse dominant la jetée et ses yachts rutilants. Çà et là, des notes contemporaines soulignent l’élégance des volumes néoclassiques. À l’arrière, une aile a récemment vu naître les dernières suites, spacieuses, quoiqu’encore plus intimes.
Ici, la table est un joli voyage. Pas seulement au petit déjeuner ou au Freud, le bar à sushis, mais aussi grâce au chef Stamatis Marmarinos, qui sublime les produits de la Méditerranée. Originaire d’Hermione, juste en face, ce grand gaillard aux faux airs de pope cultive en bio toutes sortes de légumes dans un vaste potager situé sur les hauteurs. Depuis peu, il propose aux hôtes de cuisiner et de déjeuner sous l’olivier, au plus près des plants de tomates et du poulailler. Une manière inédite de goûter aux joies simples d’une île paradis.
Poseidonion Grand Hotel, à partir de 260 € la nuit en haute saison, www.poseidonion.com
7 nuits, à partir de 1 550 €/ pers. (base 2), vols et transferts inclus. 01.48.78.71.51, www.safransdumonde.com
Escale de charme
Autre île merveilleuse, Hydra est à seulement 40 minutes de Spetses en hydroglisseur. Elle aussi interdite aux moteurs, on n’y circule qu’à pied ou à dos d’âne. Son port bijou, ses boutiques trendy, ses ruelles et ses garrigues attirent une faune gypsy-chic éprise d’authenticité. Le collectionneur Dakis Joannou y a ouvert en 2009 une annexe de sa fondation Deste pour l’art contemporain. Une présence qui ne passe pas inaperçue quand il amarre son méga-yacht pop art décoré par Jeff Koons.