Bruno Le Maire : « L’ENA ne doit plus former ceux qui dirigent la France »
Sur le créneau de l’anti-système, ils sont désormais nombreux : Marine Le Pen, historiquement, Nicolas Sarkozy contre les « élites indifférentes au sort du peuple », Emmanuel Macron contre un « système politique » qui produit de l’alternance sans choix politique, etc. Bruno Le Maire, lui, s’attaque à l’École du « système » : l’ENA, dont lui-même est issu. « Je veux supprimer l’ENA pour bien marquer que la France est entrée dans une nouvelle ère : la technocratie, c’est fini. Place aux entrepreneurs et à l’innovation. L’ENA ne doit plus former ceux qui dirigent la France », explique au Point le député de l’Eure, candidat à la primaire de la droite.
Mais supprimer l’ENA ne signifie pas que la France se passerait soudainement de hauts fonctionnaires. Bruno Le Maire ne tombe pas dans ce simplisme. Il transforme, en vérité, l’ENA (avec les mêmes locaux à Strasbourg) en école d’application pour former de hauts fonctionnaires après 10 ans de services. « Plutôt que de confier la direction de la France à des gamins de 20 ans qui ont réussi un concours, je veux une école d’application sur le modèle de l’École de guerre sur la base du mérite. C’est un principe de justice progressive. »
Diversifier les parcours
En somme, seuls les administrateurs civils ayant démontré des qualités au bout de dix ans de service seraient à même d’effectuer une année supplémentaire au sein de cette école, qui donnerait accès aux grands corps (Conseil d’État, Cour des comptes, direction centrale d’administration…). Bruno Le Maire s’inspire du modèle militaire : seuls les meilleurs officiers ayant démontré sur le terrain des états de service impeccables ont accès à l’École de guerre, qui leur permet d’accéder au rang d’officier général. « Un officier de marine qui fait des bêtises ne devient jamais amiral car il n’est pas admis à l’École de guerre. »
Autre réforme au passage : diversifier les parcours. Cette école d’application de la haute fonction publique proposerait une année de spécialisation qui serait indépendante de la formation initiale. « Aujourd’hui, pour devenir ambassadeur, il faut quasi obligatoirement être passé par le Quai d’Orsay. Dans cette école, un administrateur civil du budget ayant fait preuve de mérite pourrait choisir une spécialisation dans un autre domaine, comme les Affaires étrangères. Cela permettrait ainsi une mixité des parcours. »