Prélèvement à la source: en 2017, un « effet richesse » pour les contribuables?

Dans le cadre du passage au prélèvement à la source, les revenus non exceptionnels perçus en 2017 ne seront pas imposés. Le gouvernement en attend des effets bénéfiques sur l’économie.

Décriée par l’opposition de droite, le prélèvement de l’impôt sur le revenu à la source est le dernier grand chantier fiscal de ce gouvernement. La réforme doit prouver une volonté de moderniser l’Etat et de faciliter la vie des contribuables. D’après l’étude d’impact qu’il vient de transmettre au Parlement, elle permettrait même indirectement d’accentuer la relance économique dès 2017. Explications.

2017, une année blanche pour les revenus

2017 ne sera pas une année blanche pour l’Etat, puisque les contribuables paieront leur impôt sur les revenus de 2016 selon leurs modalités habituelles. A partir du 1er janvier 2018, ils seront prélevés sur leurs revenus 2018. Mais l’année sera blanche en ce qui concerne les revenus non exceptionnels de 2017.

Traitements, salaires, pensions, revenus de remplacements, revenus des indépendants ou revenus fonciers perçus au cours de cette année charnière vont coûter zéro au contribuable. Grâce à un dispositif « ad hoc », le crédit d’impôt de modernisation du recouvrement (CIMR), les impôts 2017 seront tout simplement annulés.

L’avis d’imposition reçu en 2018 mentionnera le montant d’impôt, net du CIMR. Si la somme égale à zéro, pas d’impôt supplémentaire. Si elle est positive du fait de revenus exceptionnels en 2017, impôt supplémentaire. Si elle est négative grâce aux réductions et aux crédits d’impôt, le montant correspondant sera restitué, « préservant ainsi le niveau de soutien aux ménages et aux différents secteurs sociaux et économiques. »

Un surcroît de travail attendu

Concrètement, en septembre 2018, vous avez toutes les chances de recevoir un avis d’imposition nul, ce qui ne vous empêchera pas d’avoir été « prélevé à la source » depuis le mois de janvier. Le gouvernement estime toutefois que les contribuables en ressentiront un « effet richesse » qui devrait avoir accroître la consommation, et donc l’activité.

Voire de « fluidifier le marché du travail », en facilitant les reconversions professionnelles. Cet effet reste cependant difficile à quantifier, reconnaît le rapport. Il « ne se matérialisera complètement qu’au moment du décès, où plus aucun impôt sur le revenu des défunts ne sera dû par les héritiers ».

LIRE AUSSI >> Impôts à la source: pour une année fiscale blanche!

L’Etat veille aussi à la triche qui consisterait à gonfler artificiellement ses revenus 2017 en minimisant ceux de 2018. « La réforme est en effet calibrée de manière à éviter les effets d’optimisation, tout en favorisant l’offre de travail des salariés comme des indépendants. » Reste que les contribuables sont encouragés à « prendre ou reprendre un emploi, prendre un second emploi ou effectuer des heures supplémentaires. » Ou encore à repousser leur départ à la retraite. Le gouvernement escompte bien que ce surcroît de travail favorise l’activité, et donc la croissance. En Islande, le PIB a augmenté de 8,5% lors de l’année de transition en 1987. Il ne faut pas s’attendre à un résultat aussi miraculeux: l’Islande connaissait le plein emploi et en a également profité pour baisser les impôts.

La réforme contient aussi une « hausse implicite »

Selon une étude récente de deux économistes de l’OFCE cependant, faire payer l’impôt sur le revenu plus tôt permet aussi à l’Etat d’encaisser une « hausse implicite ». Même à un rythme très faible de croissance et d’inflation, l’impôt dû par le contribuable augmente en effet année après année. Avec cette réforme, il va payer en 2018 un petit peu plus que s’il avait été imposé sur ses revenus 2017. « La mise en place du prélèvement à la source aura un impact positif sur la comptabilité de l’Etat », reconnaît le document gouvernemental.

« L’Etat est gagnant car il va percevoir un surplus relatif de recettes fiscales qui est égal au taux de croissance nominal de l’économie », note l’OFCE. Les jeunes actifs qui entreront dans l’impôt cette année là, et qui n’auront même pas le bénéfice de l’année blanche, sont les grands perdants. « L’Etat ne nous fait plus crédit », remarque également pour L’Express Vincent Touzé, un des auteurs de l’étude. En effet, plus de gains éventuels à attendre de l’épargne de précaution constituée en vue du paiement de l’impôt dans le système actuel.