François Hollande bienfaiteur de… Vincent Bolloré !

Vincent Bolloré sauvé par François Hollande ? C’est le président de la République qui s’en targue dans Un président ne devrait pas dire ça. L’homme d’affaires breton était, en effet, dans une phase difficile au printemps 2014. Propriétaire de Vivendi, donc de Canal+, Bolloré redoutait l’appel d’offres de la Ligue de football et la redoutable surenchère de beIN Sports, la chaîne du Qatar.

C’est là que François Hollande intervient. Il dit avoir reçu secrètement Bertrand Meheut et Rodolphe Belmer, les deux dirigeants de Canal+, venus demander un coup de main. Bonne pâte, le chef de l’État s’exécute. « On a sauvé Canal », lâche-t-il à Gérard Davet et Fabrice Lhomme, les auteurs du livre. Et Hollande de raconter son coup de pression : « J’ai appelé l’émir du Qatar, je lui ai dit : Vous allez venir en France en juin, on vous a défendus par rapport aux Saoudiens, on est à vos côtés, mais là, qu’allez-vous faire sur les Rafale ? Il y a aussi l’histoire du foot… Je souhaite qu’il y ait un partage. » Sous-entendu : un partage des droits TV.

Et de fait, c’est exactement ce qui s’est passé : Canal+ a conservé les meilleures affiches de la Ligue 1 pour 726,5 millions d’euros et les Qataris ont pris le reste pour 186,5 millions d’euros et la Ligue 2 pour 22 millions d’euros… Que le chef de l’État exerce une diplomatie parallèle n’est pas choquant en soi. Qu’il défende les intérêts d’un fleuron français de l’audiovisuel est même très estimable. Il est dans son rôle. Mais qu’il le dise à des journalistes et explique – s’en rend-il compte ? – qu’il a truqué un appel d’offres de la LFP laisse une fois de plus pantois…

Hollande : « Il faut sortir de l’imaginaire complotiste »

L’exercice du pouvoir exige, à ce niveau de responsabilités, une part de secret irréductible et qui ne souffre aucune exception. François Hollande n’a pas de respect pour sa fonction et se place ainsi dans une situation délicate. La LFP, en découvrant ses propos – page 305 du livre –, pourrait très bien remettre en cause cet accord avec Canal+ et beIN Sports en exigeant un dédommagement… Il est probable qu’aucune plainte ne sera déposée contre François Hollande qui jouit dans ses fonctions de l’immunité présidentielle. Mais, une fois de plus, il est insensé qu’il se laisse aller à de telles confidences… Dans dix ans, dans un ouvrage mémoriel, pourquoi pas ? Mais pas aujourd’hui en plein mandat…

On notera qu’il vient en aide à Vincent Bolloré sans esprit partisan. Bolloré, c’était « l’homme du yacht », celui sur lequel Nicolas Sarkozy avait pu se reposer quelques jours après sa victoire en 2007. Certains le décrivent comme un allié politique de l’ancien président, un homme qui aurait mis Canal+ au pas pour éviter qu’elle ne soit ce foyer anti-sarkozyste notoire… Hollande n’entre pas dans ce genre de considérations et c’est plutôt à son honneur. « Il faut sortir de l’imaginaire complotiste, dit-il aux auteurs du livre par lequel le scandale arrive. Il n’est pas vrai que les proches de Nicolas Sarkozy contrôleraient, comme ça, mécaniquement… Ça ne se passe pas comme ça. Ou alors ça s’est passé comme ça, il y a quelques années, qui ne sont pas si lointaines, mais aujourd’hui, ça ne se passe pas comme ça. » Naïveté ? Il faisait allusion aux nombreux bras de fer engagés entre 2007 et 2010 par Patrick de Carolis, l’ancien président de France Télévisions, avec Nicolas Sarkozy. Et qui ont nourri autrefois la chronique de l’auteur de ces lignes.