Primaire de la droite : l’avertissement de Sarkozy à Bayrou et Lagarde
La tension est montée d’un cran jeudi dans la primaire de la droite, avec l’avertissement de Nicolas Sarkozy aux alliés centristes d’Alain Juppé, François Bayrou et Jean-Christophe Lagarde, sommés de soutenir le vainqueur, même en cas de défaite du maire de Bordeaux. Depuis la Corse, où il était en campagne, Nicolas Sarkozy n’a pas mâché ses mots. « Je n’aime pas les gens qui participent à une compétition et qui en contestent les règles », a-t-il lancé jeudi matin sur Europe 1, à un mois, jour pour jour, du premier tour.
« Je dis simplement à M. Bayrou et à M. Lagarde que si on soutient un candidat à la primaire, on s’engage à respecter la règle de la primaire. Et si jamais ce n’était pas le candidat qu’ils soutenaient qui gagnait, eh bien ils devraient respecter la règle de la primaire. C’est ça, la loyauté », a assené l’ancien président.
Ne pas favoriser les extrêmes
L’avertissement est sans équivoque. Dans le collimateur, d’abord François Bayrou, le président du MoDem, auquel Nicolas Sarkozy n’a jamais pardonné son soutien à François Hollande en 2012. « La règle, c’est surtout de ne pas se servir, pour sortir du socialisme, de celui qui nous y a fait rentrer », a-t-il affirmé. Le Béarnais compte parmi les plus conspués dans les meetings sarkozystes. « Il y avait Taubira, il y a eu Najat Vallaud-Belkacem et maintenant, c’est Bayrou », affirme François Baroin, cité par L’Express.
Retiré dans sa mairie de Pau, conquise en 2014, François Bayrou a de longue date annoncé son soutien à Alain Juppé. Mais pas question pour lui de voter à ce scrutin, ni de se sentir lié par le résultat de la primaire, cette procédure qui « favorise les extrêmes de chaque camp », à l’image de Donald Trump chez les républicains américains. Il est donc prêt à tenter une quatrième fois sa chance à la présidentielle si l’issue de la primaire ne lui convient pas. Conscient de son rôle d’épouvantail à droite, François Bayrou a lui-même expliqué mercredi que son rôle n’était « pas de participer aux meetings » d’Alain Juppé car une partie de l’électorat a été « en désaccord avec lui ».
Campagne en perdition
Jeudi, il a répliqué à Nicolas Sarkozy en estimant qu’il n’avait pas à lui « dicter ce qu'(il) doit faire ». « Cette mise en demeure est donc déplacée, comme si souvent les déclarations de son auteur », a ajouté François Bayrou, qui se « détermine uniquement en fonction de (sa) conscience et de l’idée qu’il (se) fait de l’avenir du pays ». L’UDI a décidé de ne pas participer à la primaire ouverte de LR, exercice inédit pour la droite. Mais près de 600 élus dont 46 parlementaires, Jean-Christophe Lagarde en tête, sans oublier le Parti radical, ont officialisé leur soutien à Alain Juppé, favori des sondages. Pour Jean-Christophe Lagarde, interrogé par l’Agence France-Presse, l’avertissement de Nicolas Sarkozy est le signe d’une « campagne en perdition ».
Frédéric Lefebvre, ancien porte-flingue de Nicolas Sarkozy et désormais pro-Juppé, a lui aussi dénoncé cet avertissement : « Pour rassembler, il ne faut ni exclure le centre ni lui dicter sa conduite mais le respecter », a-t-il dit sur Twitter. En toile de fond, des discussions agitent les états-majors autour des législatives. Alain Juppé a récemment prévenu qu’il « rediscuterait des investitures » s’il gagnait la primaire, pour accorder une plus grande place aux centristes. Ce qui a fait bondir les sarkozystes, qui oublient pourtant que LR avait fait alliance non seulement avec l’UDI, mais souvent aussi avec le MoDem aux régionales. Difficile de mesurer à l’avance le poids réel des centristes, voire de la gauche, dans cette consultation électorale unique. « Le centre ne s’est jamais mobilisé », dit-on dans le camp Sarkozy. Quant à la mobilisation d’électeurs de gauche en faveur d’Alain Juppé, on n’y croit « pas une seconde ». Mais « ça sert pour mobiliser la droite ».