Mort de Paul Vergès : de la Résistance au chef réunionnais


Élu une première fois en 1956

Frère du célèbre avocat Jacques Vergès, décédé en 2013, et fils de Raymond Vergès qui a œuvré à la départementalisation de La Réunion et des Antilles-Guyane en 1946, Paul Vergès a profondément marqué la vie politique de La Réunion. Sa mère d’origine vietnamienne est morte en 1928. Dans le sillage de son père, proche du Parti communiste français, Paul Vergès s’était engagé très vite en politique. Il a 17 ans lorsque, aux côtés de son frère Jacques, il s’engage dans les Forces françaises libres.

Son parcours est étonnant. Il est par exemple accusé du meurtre d’un homme politique du MRP en 1947. Il est condamné, mais amnistié. Quand il revient sur l’île après cette épreuve judiciaire en métropole, il commence son ascension politique. Dans les années 1950, l’île souffre d’une grande misère sociale et d’un retard de développement économique que la récente départementalisation n’est pas parvenue à soulager. Conseiller général en 1955, il est élu une première fois député en 1956. Le tournant de son action politique se situe en 1959, lorsque « pour mieux ancrer la revendication identitaire réunionnaise », il quitte le PCF, fonde le Parti communiste réunionnais (PCR) et lance le mot d’ordre d’autonomie, puisque « la départementalisation est un rêve raté ». Il est condamné à plusieurs reprises pour des délits de presse et atteintes à la sûreté de l’État, notamment durant la guerre d’Algérie. Il entre en clandestinité pour éviter d’être arrêté. Il ne se rendra aux autorités qu’en 1966, mais bénéficiera d’un non-lieu. La carrière politique peut reprendre. Officiellement. Il enchaîne les mandats électoraux et abandonne (un peu) ses velléités indépendantistes. En 1981, à l’arrivée de François Mitterrand à la présidence de la République, le PCR met « en sommeil » son mot d’ordre d’autonomie pour tenter « l’expérience » de la décentralisation.

Un homme politique visionnaire

En plus d’un demi-siècle de vie publique, il aura été conseiller général, député (1956, 1986, 1993), sénateur (1996-2005, 2011-2016), parlementaire européen (1979-1989, 2004-2007), maire (1971-1989), président de région (1998-2010). Souvent qualifié d’homme politique « visionnaire » y compris par ses adversaires politiques – il a été l’une des premières personnalités à mettre en garde contre le réchauffement climatique –, Paul Vergès a été « un puissant bâtisseur de La Réunion, portant et concrétisant des projets majeurs de développement de l’île », a souligné la présidente UDI du conseil départemental, Nassimah Dindar, la première à réagir. « Je salue avec beaucoup d’émotion la mémoire de Paul Vergès. Son combat pour l’égalité a changé le quotidien de tous les Réunionnais », a tweeté la ministre des Outre-mer, Ericka Bareigts, elle-même réunionnaise.

« La Réunion pleure un véritable monument de l’histoire de notre île dont l’engagement de tout instant au service de la cité aura eu des retentissements au-delà de nos rivages », a souligné le Conseil représentatif des Français d’outre-mer, pour qui le nom de Paul Vergès « restera attaché aux plus grandes transformations qu’a connues La Réunion depuis les années 1950 ». « L’engagement de Paul Vergès au service de son île a été constant. Il a été de tous les combats qui ont façonné La Réunion », a salué le préfet de l’île, Dominique Sorain.