Arbitrage Tapie: ce que le procès Lagarde pourrait changer
La directrice du FMI va comparaître devant la Cour de justice de la République pour la décision qui a permis à Bernard Tapie d’empocher 404 millions d’argent public. Elle risque un an de prison et 15 000 euros d’amende.
A-t-elle été négligente avec les fonds publics? Ou sert-elle de bouc émissaire? La directrice du FMI Christine Lagarde comparaît lundi 12 décembre devant la Cour de justice de la République, chargée de juger les ministres et secrétaires d’Etat pour les crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions.
En 2007, elle avait opté pour le choix d’un arbitrage privé dans le conflit entre l’homme d’affaires et l’ancienne banque publique Crédit Lyonnais, sur la revente en 1994 de l’équipementier sportif Adidas. La procédure avait permis à Bernard Tapie d’empocher 404 millions d’argent public.
L’arbitrage se préparait avant elle
Selon l’arrêt qui renvoie Christine Lagarde en procès, il lui est reproché d’avoir fait preuve « d’une incurie et d’une précipitation critiquables » et d’avoir « privé l’Etat d’une chance d’éviter que ses fonds soient détournés ». L’arbitrage a été annulé en 2015 au civil, avec obligation pour Bernard Tapie de rembourser.
A sa décharge, il est relevé que le recours à l’arbitrage se préparait avant son arrivée à Bercy. La Cour veut, selon des sources proches du dossier, citer également deux de ses prédécesseurs, Thierry Breton et Jean-Louis Borloo, ainsi que deux anciens piliers de l’Elysée: l’ex-secrétaire général de la présidence Claude Guéant, et l’ancien conseiller économique de Nicolas Sarkozy, le banquier François Pérol.
« Pas beaucoup de femmes dans cette affaire »
Dans le volet pénal, les enquêteurs soupçonnent un « simulacre » au bénéfice de l’homme d’affaires, dont l’avocat avait des liens avec l’un des arbitres. Six personnes, dont son ancien directeur de cabinet Stéphane Richard, actuel PDG d’Orange, sont mises en examen entre autres pour « escroquerie ». La Cour souhaite également entendre ce dernier comme témoin.
« Il n’y a pas beaucoup de femmes dans cette affaire, je constate », note Christine Lagarde dans une interview à L’Obs. Une façon sibylline de refuser de porter le chapeau à elle seule.
En congé du FMI, le temps du procès
Christine Lagarde, reconduite haut la main l’été dernier pour un deuxième mandat à la tête du FMI, a indiqué à L’Obs qu’elle se mettrait « en congé » de ses responsabilités le temps du procès, qui doit durer jusqu’au 20 décembre: « Je vais faire ce que je ferais si j’étais en vacances. »
Elle risque jusqu’à un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende. Une condamnation pourrait compliquer son mandat à la tête de l’institution. Dans son entretien à L’Obs, Christine Lagarde semble cependant se montrer confiante, rappelant avoir le soutien constant du conseil d’administration du FMI.